Homélie du samedi 27 juin 2020

13ème DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE Mth. 10, 37-42 :

La Famille n’est pas intouchable

 La paternité est une des réalités humaines qui, plus que les autres, nous rapproche de Dieu. Les croyants de la Bible présentent Dieu comme un père. Certains ont même eu l’audace, pour leur époque, de parler de Dieu comme une mère. Dieu est père, Dieu est mère. Jésus lui-même, pour décrire son lien avec Dieu, le fait dans les termes de « père » et de « fils ». Il ne craint pas d’appeler Dieu : « Abba », qui peut se traduire par « papa ».

Ce texte de l’Évangile peut nous sembler contredire l’enseignement traditionnel de Jésus, qui exige de ses disciples qu’ils observent les commandements, et en particulier « Honore ton père et ta mère » (Mc. 10,19).

Comprenons-bien. Jésus n’exige pas de ses disciples qu’ils n’aiment pas leur « père, mère, femme et enfants » ; mais qu’ils sachent que pour eux, et pour nous aujourd’hui, le plus important c’est d’être des disciples.

Le disciple de Jésus s’efforce de vivre les Béatitudes, d’être témoins, toujours et partout, de l’amour, de la paix et de la justice que Dieu veut pour tous. La famille peut être très bien le premier lieu où porter ce témoignage. Il ne s’agit pas de mépriser père, mère, femme et enfants, mais d’une invitation à témoigner du Royaume de Dieu, et peut-être d’abord auprès de ton père, de ta mère, de ta femme / de ton mari et de vos enfants. Jésus n’incite nullement à mettre la famille à l’arrière-plan. Il veut tout simplement que ses disciples sachent reconnaitre où est le plus important pour eux.

Être son disciple, c’est prendre le même chemin que lui, le chemin de l’accueil, du service et du partage qui nous ouvre sur un monde nouveau que Jésus appelle « le Règne de Dieu ». Jésus en a témoigné jusqu’à donner sa vie. L’amour filial, l’amour des époux, l’amour des enfants, l’amour de soi-même, sont, pour tout chrétien, des réalités qu’il faut animer par un amour plus large : celui qui animait Jésus et l’a conduit de la mort à la résurrection.

Ce qui est décisif ce n’est pas la famille charnelle mais cette autre grande famille que nous, ses fils et ses filles, nous devons bâtir en collaborant avec Jésus à ouvrir des chemins pour établir le Règne de Dieu-Père sur cette terre. C’est pourquoi, si la famille devient un obstacle qui nous empêche de suivre Jésus dans ce projet, Jésus nous met en garde : Celui qui préfère son père ou sa mère plus que moi, n’est pas digne de moi. Celui qui préféré son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi.

Cela veut dire que, lorsque la famille empêche la solidarité et la fraternité et ne permet pas à ses membres de travailler pour la justice et la paix entre les hommes, Jésus exige une liberté critique, saine, même si cela entraîne des conflits et des tensions dans le sein de la famille.

A la suite de l’Évangile, nous pouvons nous poser quelques questions : nos foyers, sont-ils une école de valeurs évangéliques telles que la fraternité, la recherche d’une société plus juste, le partage, le service, la prière, le pardon ? Ou bien sont-ils justement des lieux de non-évangélisation, des courroies de transmission des égoïsmes, des injustices, des conventionnalismes, des aliénations et de la superficialité de notre société ? Éduquons-nous nos enfants lorsque nous ne les stimulons que pour la compétitivité et la rivalité ? Une pareille famille, est-elle celle que nous, chrétiens, nous devons défendre ? Est-elle la famille où les nouvelles générations pourront entendre l’Évangile ?

Sylvain, Agathe, Anissa, Mallaury et vous tous et toutes : Faisons de nos familles une école de fraternité, de justice et de solidarité. Amen !

Père Javier