Homélie de la fête de la Toussaint

(Lectures : Apocalypse 7, 2-4.9-14 ; 1 Jean 3,1-3 ; Matthieu 5,1-12)

La Toussaint est une fête de l’espérance, cette vertu qui nous fait percevoir, au-delà de la réalité visible, une autre réalité invisible à nos yeux, et à laquelle nous croyons par la foi. Foi et espérance sont deux vertus théologales qui nous sont données par Dieu. Par la foi nous croyons aux réalités divines que nous proclamons chaque dimanche. L’objet de notre credo c’est d’abord Dieu lui-même, dans ses trois Personnes, Père, Fils et Esprit, puis nous ajoutons d’autres objets : l’Église, la communion des saints, la rémission des péchés, la résurrection de la chair, la vie éternelle.

La vertu d’espérance nous fait entrevoir une continuité entre ces deux mondes, celui du visible et celui de l’invisible auquel nous croyons. Seul un voile sépare ces deux mondes qui sont en fait les deux aspects d’une même réalité. Nous pouvons le pressentir lorsque nous perdons quelqu’un de cher. Nous éprouvons à la fois la tristesse de la perte – le deuil est le long travail d’acceptation de cette perte – et la conviction dans notre cœur qu’un lien demeure par-delà la mort. Ceci est valable autant pour nos proches que pour ceux que l’on nomme les saints, que nous n’avons pas connu personnellement, mais qui par le rayonnement de leur personnalité ont pu, de leur vivant, nous éclairer sur notre route et continuent de le faire, d’une autre manière après leur mort. Pensons à sainte Teresa de Calcutta ou à saint Jean-Paul II. Ils agissent toujours lorsque nous prions à leur intercession. Il en va de même pour tous les saints qui ont éclairé l’Église depuis deux mille ans. La communion des saints manifeste bien cette proximité entre ceux qui sont auprès de Dieu et nous qui poursuivons notre route sur terre.

Il existe une troisième vertu théologale qui s’appelle la charité et qui consiste à rendre visible ce qui est invisible, à savoir l’amour de Dieu. Lorsque les relations entre nous sont vécues dans la charité, on dit parfois que c’est le ciel sur la terre. Dans sa première lettre saint Jean écrit : « Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. Nous le savons : lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu’il est. » Vivre en enfant de Dieu, c’est vivre pleinement de la charité et rendre visible l’amour de Dieu. Peut-être que pour nous cela ne paraît pas encore clairement, et certainement que lorsque Jésus viendra dans sa gloire, sa sainteté rejaillira sur nous, mais il y a déjà des personnes chez qui  il apparaît plus clairement qu’ils sont enfants de Dieu, par le rayonnement de leur charité. Ce sont les saints. Certains nous sont donnés en exemple, pour nous montrer qu’il est possible de vivre en enfant de Dieu, que cela peut se voir de multiples manières. Les béatitudes sont autant de déclinaisons possibles de la charité, elles sont le portrait de Jésus dont les différents traits se reflètent dans la vie des saints. Chaque baptisé revêt le Christ ressuscité – le vêtement blanc que nous recevons et qui apparaît dans la vision de l’Apocalypse – et chacun révèle plus particulièrement un aspect du visage du Christ, discrètement au départ, et de plus en plus nettement lorsque nous avançons sur notre chemin de charité ou de sainteté, c’est pareil.

Prenons le temps de méditer les différentes béatitudes en cette fête de la Toussaint et voyons s’il n’y aurait pas l’une d’entre elles qui nous interpelle plus particulièrement et qui nous caractérise comme enfant de Dieu.

P. Michel