Homélie du dimanche 31 mars 2019

Luc 15, 1-32 – UNE PARABOLE POUR NOTRE TEMPS24 T.O. C

Nous venons d’écouter la parabole du père miséricordieux, autrefois la parabole de « L’Enfant prodigue ». Dans cette parabole, Jésus a voulu nous faire entrer profondément dans le mystère de Dieu et dans le mystère de la condition humaine.

Le fils cadet dit à son père : « donne-moi la part d’héritage qui me revient ». Le père accède à son souhait sans rien dire, car c’est le fils qui doit choisir librement son chemin. Le père le voit s’en aller, mais ne l’abandonne pas ; son cœur de père l’accompagne. Chaque matin il l’attendra. De même que dans la parabole le père garde le silence, de même Dieu ne force personne ; à nous de choisir.

Peu de temps après, son aventure commence à devenir un drame. Survient une « terrible famine » et il ne peut survivre qu’en étant l’esclave d’un étranger et en gardant ses porcs. Ses paroles révèlent sa tragédie : « Ici, je meurs de faim ».

C’est justement le retour au foyer de ce jeune frère qui a toujours attiré l’attention des prédicateurs. Le jeune homme entra en lui-même et, en pénétrant dans son propre vide, il se rappelle le visage de son père associé à une abondance de pain : Chez mon père ils ont du pain en abondance et moi ici je meurs de faim.  Le désir d’une nouvelle liberté auprès de son père s’éveille dans son cœur. Il reconnait son erreur et prend une décision. : Je me lèverai et je reviendrai vers mon père. Son retour au foyer et l’accueil incroyable du père qui sort en courant à la rencontre de son fils, se jette à son cou et se met à le couvrir de baisers avec effusion, ses accolades et ses baisers disent mieux son amour de père que tous les livres de théologie.

Cependant, la parabole parle aussi du fils aîné, un garçon qui reste auprès de son père et qui n’imite pas la vie désordonnée de son frère, loin du foyer. Lorsqu’il est informé de la fête organisée par son père pour accueillir le fils perdu, il se sent troublé. Contrairement à son père, le retour de son frère ne suscite pas chez lui de la joie mais plutôt de l’indignation : « il se mit en colère et il refusait d’entrer à la fête ». Lui, n’était jamais parti de la maison mais maintenant il se sent comme un étranger parmi les siens.

Le père sort à sa rencontre pour l’inviter, avec la même affection dont il avait accueilli son frère. Il ne crie pas sur lui, ni lui donne des ordres. Avec un amour humble, « il essaie de le persuader » pour qu’il prenne part à la fête de l’accueil. C’est alors que le fils éclate, laissant voir tout son ressentiment. Lui, il a passé toute sa vie à obéir aux ordres de son père, mais il n’a pas appris à aimer comme son père est capable d’aimer. Maintenant, il ne sait qu’exiger ses droits et dénigrer son frère.

C’est là la tragédie du fils aîné. Il n’a jamais quitté la maison, mais son cœur est resté toujours loin. Il sait accomplir les commandements mais il ne sait pas aimer. Il ne comprend pas l’amour de son père à l’égard de ce fils perdu. Il n’accueille pas et ne pardonne pas. Il ne veut rien savoir de son frère. Et Jésus finit sa parabole sans satisfaire notre curiosité : finalement, est-il entré dans la fête ou est-il resté dehors ?

Le fils aîné constitue une interpellation pour nous, qui croyons vivre dans la maison du Père. Que sommes-nous en train de faire : Assurer notre survie religieuse en observant le mieux possible ce qui est prescrit, ou bien d’être des témoins du grand amour de Dieu pour tous ses fils et ses filles ? Construisons-nous des communautés ouvertes, capables de comprendre, d’accueillir et d’accompagner ceux et celles qui cherchent Dieu au milieu de leurs doutes et de leurs questions. Dressons-nous des barrières ou savons-nous tendre des ponts ? Savons-nous leur offrir notre amitié ou les regardons-nous avec méfiance ? De même que dans la parabole le père garde le silence, de même Dieu ne force personne. C’est à nous de choisir.

Père Javier