Troisième dimanche du temps ordinaire - année C
27 janvier 2013
Les
textes du jour
La première lecture se situe à l’époque du retour d’exil. Alors que le peuple a tout perdu, le voici de retour dans Jérusalem détruite. Sous la direction de Néhémie, Israël redécouvre l’enracinement de sa foi : la Loi raconte le don de Dieu et tous doivent l’entendre. En écoutant la parole et les explications données par les lévites, tous comprennent la grandeur du don de Dieu aux hommes. Et l’effet est immédiat ! Ils se mettent tous à pleurer tant la parole les rejoint dans leur cœur.
Si seulement nos communautés pouvaient vivre une telle liturgie... Car elle est bien vivante cette Parole que nous proclamons à chaque eucharistie, que certains méditent régulièrement. Ainsi, accueillons cette première lecture comme une invitation renouvelée à donner toute sa place à l’écoute de l’Écriture dans notre vie spirituelle. C’est à moi personnellement que cette Parole écrite hier est adressée aujourd’hui ; Dieu a quelque chose à me dire.
Si notre relation à Dieu ne s’enracine pas dans sa Parole, nous risquons de rester analphabètes de la foi. Chacun est à même de vérifier le temps concret qu’il passe avec la Parole de Dieu. Certes, il est important de parler à Dieu, de le célébrer dans la liturgie, de le rencontrer dans le frère, mais il est indispensable de Le laisser parler. C’est le contact régulier, familier avec la Parole qui nous engendre comme fils.
Il ne s’agit pas d’analyser un texte, ce qui suppose une compétence, et donc un accès plus difficile. Se réfugier derrière la difficulté du texte pour ne jamais ouvrir le livre des Écritures, c’est dire à Dieu : ta Parole est difficile, elle n’est pas pour moi. Comment Dieu pourrait-il s’adresser à chacun dans un texte peu compréhensible par tous ? Or nous lisons dans le livre du Deutéronome (30, 14) : « elle est tout près de toi, cette Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur ». Il nous faut apprendre à accueillir la Parole avec le cœur.
Comment s’y prendre ? Sans réduire le texte à ses vues personnelles, et avant de vouloir l’actualiser, tout commence par laisser Dieu se révéler peu à peu à soi à travers un mot, une expression qui retentit davantage. Cela peut se faire personnellement mais ne peut-on pas imaginer dans notre communauté des groupes qui se retrouvent régulièrement pour s’aider mutuellement à entrer dans cette intelligence du cœur des Écritures.
Cela suppose de notre part un acte de foi : derrière le texte, c’est quelqu’un qui vient à nous, le Christ, Parole de Dieu fait homme. Le contact avec la Parole n’est pas en vue d’acquérir de nouvelles connaissances mais d’entrer dans une plus grande amitié avec le Christ, lui qui nous redit comme il le disait au gens de Nazareth : « cette Parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit ».
Se détourner de la Parole, c’est empêcher le Christ de faire retentir en soi cette Bonne Nouvelle de l’œuvre de libération qu’il veut accomplir en tout homme (cf. passage du prophète Isaïe que Jésus lit dans la synagogue de Nazareth : « Le Seigneur m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux opprimés qu’ils sont libres, et aux aveugles qu’ils verront la lumière… »). Comment pourrions-nous nous priver d’un tel trésor ?
Nous laissant façonner par cette Parole nous sommes alors appelés à être serviteurs de la Parole, comme le souligne saint Luc au début de son Évangile. Serviteur de la Parole, qu’est-ce à dire ? On peut facilement être serviteur de son frère mais comment servir la Parole ? Cette Parole ne porte du fruit que si elle est méditée, intériorisée, ruminée, avant d’être proclamée. Servir la Parole, c’est la laisser porter du fruit en nous et à travers nous.
Cette Parole fait du chemin en nous et nous provoque à faire du chemin vers les autres. Un des obstacles est certainement la recherche d’une immédiateté, d’une efficacité, or devenir serviteur de la Parole suppose de la patience et surtout de la fidélité. Un des moyens est l’expérience régulière de la lectio divina. La lectio divina est une façon de lire la Bible qui est une écoute de la Parole de Dieu s’adressant à la femme et à l’homme d’aujourd’hui et l’invitant à entrer en dialogue avec lui.
Cette lecture spirituelle exigeante permet à la Parole envoyée par Dieu d’accomplir son chemin jusqu’à fructifier dans le cœur de l’homme. Peu à peu, s’établit une communion d’amour entre Dieu qui parle et le croyant qui écoute d’abord et répond ensuite. C’est ainsi que le psalmiste peut dire : « La Loi du Seigneur est parfaite, qui redonne vie… Accueille les paroles de ma bouche, le murmure de mon cœur » (Ps 18).
Père Bruno