32ème dimanche du temps ordinaire 7 novembre 2010
Les textes du jour
Voilà Jésus confronté aux Sadducéens. Ceux-là sont peu présents dans l'Évangile car on ne les trouve qu'à Jérusalem. À la différence des pharisiens qui sont présents dans la synagogue, les Sadducéens sont exclusivement au Temple et constituent une grande partie du conseil du Sanhédrin. Leur conception de la loi diffère de celle des pharisiens : ils ne reconnaissent que la Loi écrite en refusant les commentaires de la tradition orale ; ils ne croient ni en la résurrection, ni aux anges.
Pour attester que la foi en la résurrection n'a aucun sens, ils viennent trouver Jésus en lui rapportant un cas quelque peu absurde. S'appuyant sur la loi du lévirat qui impose à une veuve sans enfant d'épouser le frère de son mari pour assurer une descendance, ils prennent l'exemple de cette femme qui se voit contrainte de se marier avec sept frères sans jamais avoir d'enfants. D'où leur question : « A la résurrection, cette femme, de qui sera-t-elle l'épouse ? »
Jésus ne répond pas directement à cette question mais prend appui sur elle pour redire la finalité de toute vie : tout homme vit pour Dieu. Saint Ignace de Loyola a écrit : « l'homme est créé pour louer Dieu ». Notre vie est tendue vers Dieu, et trouve son achèvement en lui. La mort ne peut pas empêcher cela car elle n'a aucun pouvoir sur le Christ Ressuscité qui vit désormais réellement en nous par l'Esprit qu’il nous a donné. « La mort a été engloutie par la victoire », affirme Paul (1 Corinthiens 15,55). C'est pourquoi Jésus insiste sur le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac, le Dieu de Jacob : il est le Dieu des vivants.
Qu'advient-il de l'homme après la mort physique ? Jésus l'affirme clairement : il est semblable aux anges, fils de Dieu et héritier de la résurrection. Ces trois expressions traduisent qu’après la mort nous louerons Dieu – c’est la mission des anges – et nous serons totalement fils en héritant de la vie du Christ mort et ressuscité. Après la mort, la vie n'est pas détruite, elle est transformée ; elle est transfigurée car nous vivrons de la vie même de Dieu que le péché n’altérera plus en nous.
Qu'en est-il alors de lien vécu dans le mariage sur terre ? L'institution du mariage pour perpétuer la vie disparaît dans la vie éternelle. Par contre, la communion d'amour entre deux êtres ne peut pas cesser puisque la vie éternelle est une communion d'amour de tous avec tous, de tous avec Dieu. L’amour des époux sera donc mené à sa perfection.
Jésus mentionne que n'auront part à la résurrection d’entre les morts que « ceux qui ont été jugés dignes ». Ce thème, courant dans l'Ecriture, évoque la notion de jugement final. La résurrection n'est pas une récompense et ceux qui en seraient exclus ne sont pas punis. Mais nous serons d'abord jugés sur l’amour que nous avons vécu au quotidien. En effet, c'est la manière dont nous avons aimé ici-bas qui nous prépare à accueillir la puissance d'amour qui se déploie dans la résurrection. Celui qui n'a jamais voulu aimer se ferme lui-même à cette vie de Dieu. C'est ce que nous disons lorsque nous parlons de l'enfer : l'enfermement sur soi par refus d'aimer.
Ainsi donc, si tous les hommes vivent pour Dieu, c'est dès maintenant, à travers nos choix, que nous devons mettre en œuvre cette vie reçue de Dieu et résister à la tentation du découragement et du doute. C'est le sens du martyr des sept frères relatés dans la première lecture qui réussissent à frapper le roi et sa suite de leur courage tant leur foi en la vie promise par Dieu les aide à affronter sans peur la mort. Si par chance nous n'avons pas à vivre cette réalité, nous pouvons compter sur la fidélité de Dieu qui nous affermira et nous protégera du mal (cf. 2ème lecture).
L’Evangile de ce dimanche nous interroge sur la foi en la résurrection et sur la finalité de notre vie : vivre pour Dieu. Le danger nous guette toujours de penser la résurrection seulement comme un après de notre mort. Cela nous permet alors de vivre sans trop nous interroger sur l’aujourd’hui. Or, si notre vie est pour Dieu, c'est dès maintenant que nous nous engageons à ressusciter. Avons-nous conscience que seul l’amour que nous manifestons aujourd'hui pour Dieu – et donc pour les autres et pour soi – traversera l'épreuve de la mort. À l'inverse nos refus d'amour sont comme un frein que nous mettons à la finalité de notre vie. D’où l’urgence de nous aimer dès maintenant les uns les autres comme Jésus nous a aimés. Il en a même fait un commandement, un commandement pour la vie humaine puis éternelle.
Ensevelis
par le baptême dans la mort du Christ, nous sommes dès à présent ressuscités en
lui ; notre vie « est désormais cachée
avec le Christ en Dieu » (Col 3, 3) : telle est la foi qui suscite notre amour,
et nous donne la force de « poursuivre
notre course » (2ème lecture), dans l’espérance de la vie éternelle. C’est
ainsi que dans le concret de nos journées nous vivrons pour Dieu.
Père Bruno