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Deuxième dimanche du temps ordinaire                15 janvier  2012

« Que cherchez-vous ? » Première parole de Jésus dans l'Évangile de Jean. Question que Jésus pose à toute personne qui désire le suivre : que cherches-tu ? L’Évangile de Jean se termine par une autre question : à Marie-Madeleine en pleurs devant le tombeau Jésus demande « qui cherches-tu ? » Tout son Évangile a donc pour objectif de passer du « que » au « qui cherches-tu ? » Il s'agit d'entrer dans une intimité croissante avec le Christ.

Dans l'Évangile de ce dimanche tout commence par cette affirmation de Jean-Baptiste « Voici l’Agneau de Dieu », tandis que Jésus va et vient – allusion à la parole de Jésus « Moi, je suis la porte. Si quelqu'un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra aller et venir, et il trouvera un pâturage » (Jean 10,9) –. Présenter ainsi Jésus fait écho à une prophétie d’Isaïe. Celui-ci décrit un mystérieux "serviteur de Dieu", innocent et pacifique mais persécuté. Brutalisé, il ressemble à un agneau traîné ait à l'abattoir. Au sein même de sa détresse, il garde la même attitude d'acceptation silencieuse. Alors, pour ceux qui se laissent attendrir, s’ouvre un chemin de conversion.

C'est ainsi que les deux disciples de Jean qui entendent cette parole se mettent à suivre Jésus, sans pour autant que celui-ci ait commencé à leur dire quoi que ce soit. Le disciple commence par se mettre en route dans un acte de confiance en Christ et non parce qu'il a tout découvert de lui. C'est toujours au cœur de notre désir que le Christ nous rejoint, se retourne vers nous.

Il ne s'agit pas d'acquérir une connaissance du Christ, faisant de lui alors un homme du passé à découvrir comme tant d'autres qui ont marqué l'histoire. Il s'agit d'entrer dans une relation personnelle où le Christ est une personne vivante aujourd'hui. C'est le sens de la question de Jésus : « Que cherches-tu ? », c’est-à-dire : quel est ton désir ! Il peut être fructueux de prendre le temps d'y répondre. Aujourd'hui, qu'est-ce qui me met en route ? Qu'est ce qui est moteur dans ma vie de foi, dans ma relation au Christ ?

Le dialogue qui suit entre Jésus et les deux disciples éclaire davantage l'attitude du disciple. André et son compagnon ne cherchent pas une certitude sur celui que Jean-Baptiste a présenté comme l’Agneau de Dieu, pas plus qu'ils ne veulent une preuve que c'est bien lui le Messie. Non, ils désirent simplement demeurer avec lui. Il n'est pas question ici d'un lieu géographique car dans l'Évangile de Jean, Jésus ne demeure nulle part. Il circule dans la région de Béthanie, il va et vient. "Demeurer" est donc une attitude spirituelle que nous pouvons traduire par "s'établir dans une communion d'amour".

C'est ainsi que nous pouvons comprendre la réponse de Jésus : Venez et vous verrez ». Là encore Jean ne dit pas où ils vont ni ce qu'ils voient. Ce "voir" est la première étape du "croire". L’Évangile de Jean se termine par cette Béatitude : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » (Jean 20, 29). La réponse de Jésus est un appel à la confiance en ce qu’il est. Rester auprès de lui signifie faire de notre relation au Christ notre priorité, notre essentiel duquel nous recevons notre manière d'être et d’engager notre vie. Sitôt après être resté, André amène son frère à Jésus. La rencontre du Christ nous renvoie vers nos frères. Rester avec le Christ n'est pas pour nous retirer du monde. Au contraire ! C'est décider que toute notre vie reflète celui que nous cherchons, que nous trouvons en demeurant avec lui.

Être disciple suppose une radicalité. Nous ne pouvons pas suivre le Christ à moitié ou de loin. Saint Paul, dans la deuxième lecture, insiste pour dire que la suite du Christ saisit tout notre être, tout notre corps. Suivre le Christ n’est pas une idée généreuse mais l'acceptation de ne plus s'appartenir à soi-même. Spontanément nous pouvons penser qu’appartenir au Christ supprime notre liberté. Or la liberté à laquelle le Christ nous appelle se déploie dans la confiance que nous mettons en lui et non dans la recherche d'une indépendance.

« Si vous demeurez fidèles à ma parole, vous êtes vraiment mes disciples ; alors vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres » (Jean 8, 31-32). Demeurer dans le Christ, dans sa parole, fait de nous des hommes libres. Cette dynamique saisit tout ce que nous sommes et fait de nous « une éternelle offrande à la louange de Dieu » (Prière Eucharistique n° IV). « Rendez gloire à Dieu dans tout votre corps », demande Paul (2ème lecture).

Nous pouvons être impressionnés par tout ce que cet appel du Christ suppose de notre part. Cela peut même nous faire peur. Rassurons-nous ! Le Christ est toujours patient et chemine à notre rythme. Il commence par poser son regard sur nous (cf. son regard sur Pierre dans l’Évangile). Il suffit simplement que nous entrions dans cette même humilité que celle de Samuel qui, tandis que Dieu se place près du lui et l'appelle, répond simplement : « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute » (1ère lecture). C'est à travers cette écoute amoureuse de la Parole que nous rencontrerons davantage le Christ et que nous pourrons le suivre par toute notre vie.

Père Bruno