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 Deuxième dimanche du temps ordinaire

 Année A              16 janvier 2011

« Voici l'Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. » C'est par ces mots que Jean Baptiste désigne Jésus, mêmes mots que le prêtre reprend à chaque messe, juste avant la communion. Ce titre donné à Jésus s'enracine dans la figure de l'agneau tel qu'on la retrouve dans l'Ancien Testament, entre autres à travers le serviteur dont parle l'Isaïe, un homme méprisé des hommes, brutalisé, mis à mort (cf. Isaïe 53).

Jean Baptiste annonce ainsi que la mission de Jésus sera celle d'offrir sa vie, comme l'agneau mené à l'abattoir, pour que les hommes soient sauvés de leurs péchés. C'est de cette façon qu'il se révèle à nous comme le Fils de Dieu (derniers mots de l'Evangile). Jean Baptiste confirme que son témoignage s'appuie sur ce qu'il a vu : l'Esprit descendre et demeurer sur Jésus. Comment alors Jean peut-il dire qu'il ne le connaissait pas (deux fois dans cet évangile) alors qu'il annonce clairement la mission de Jésus ?

Le temps liturgique dit "ordinaire" est un temps où nous allons entendre dimanche après dimanche des épisodes de la vie de Jésus. Facilement nous pourrions nous dire : nous les connaissons, comme nous connaissons assez fidèlement les Evangiles. Et si nous écoutions chacune de ces lectures dans la même attitude que celle de Jean Baptiste : « Je ne connais pas Jésus ». Ce serait une façon de dire notre désir de nous laisser surprendre par lui.

A s’imaginer connaître l'Evangile, nous risquons de nous arrêter à l'histoire et de ne jamais faire de cette lecture une rencontre personnelle avec Jésus-Christ. C'est aussi ce que signifie cette affirmation de Jean-Baptiste : « Derrière moi vient un homme qui a sa place devant moi, car avant moi il était ». Jean-Baptiste s'efface devant celui qu'il annonce : humilité de celui qui ne cherche pas à maîtriser Jésus, à l'enfermer dans une connaissance intellectuelle, pour laisser peu à peu son cœur se convertir à une rencontre authentique.

Toute rencontre avec Dieu commence par le laisser nous redire tout l'amour qu'il met en nous. Nous laisser surprendre par le fait que Dieu nous aime ! Il nous aime gratuitement et nous fait confiance. Le Serviteur du livre d’Isaïe s'extasie : « Oui, j'ai du prix aux yeux du Seigneur ». Chacun de nous est précieux pour Dieu. Nous percevons bien que si cette conviction était profondément la nôtre, toutes nos relations en seraient changées.

D'abord la relation avec nous-mêmes : nous avons besoin de connaître notre valeur, car elle nous permet de nous situer face aux autres. Pour Dieu notre valeur est sans limite : apprendre à me connaître comme Dieu me connaît. C'est bien ce quoi s'engage Dieu: me faire découvrir comment lui me connaît, m’espère, pour me permettre de mieux me découvrir moi-même en vérité. C'est alors que je peux être dire « c'est mon Dieu qui est ma force » (1ère lecture).

Mais si je suis précieux dans le cœur de Dieu, l'autre en face de moi, y compris mon pire ennemi, est tout aussi précieux pour Dieu. C'est cette attitude qui permet de ne pas enfermer l'autre dans la perception immédiate que j'en ai. Apprendre à connaître l'autre comme Dieu le connait. Or bien souvent nous préférons limiter notre connaissance à un jugement sur l'autre. Les textes de ce dimanche nous invitent donc à nous laisser surprendre par Dieu mais aussi par nous-mêmes et par les autres.

Mais cela ne s'arrête pas là car nous lisons encore en Isaïe : « C'est trop peu que tu sois mon serviteur : je vais faire de toi la lumière des nations ». Non seulement Dieu nous connaît – nous-mêmes et les autres – bien mieux que nous l'imaginons car il nous connaît en espérance, mais il nous choisit pour être sa lumière auprès de tous. Il compte sur nous pour que la force de son salut, de son amour, soit connue de tous. Dieu a fait le choix qu'avec nos limites et nos faiblesses nous soyons capables d'être témoin de sa présence. Paul nous dit : « Vous qui êtes, par appel de Dieu, le peuple saint ». L'appel de Dieu pour chacun est que nous rayonnions sa sainteté par toute notre vie. Cela ne peut que nous étonner quand nous connaissons notre lenteur à nous convertir.

Le projet de Dieu est toujours surprenant car il dépasse nos raisonnements et nos certitudes. C'est pourquoi il est important de se laisser surprendre par Dieu. Aussi, comme Jean-Baptiste, avec humilité, osons redire : « Je ne le connais pas ». C'est alors que nous pouvons devenir à notre tour pleinement fils de Dieu, unis au Fils de Dieu, l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde.

Père Bruno