retour entrée site

 Vingt huitième dimanche du temps ordinaire

 Année A              9 octobre 2011

« Ce jour-là… » Ainsi commence la lecture d’Isaïe de ce dimanche : ce jour-là, Dieu lui-même préparera pour tous les peuples, sur sa montagne – chez lui ! –, un festin. À travers cette image forte, le prophète nous introduit dans ce jour qui nous attend. Inauguré par le jugement dernier, à la fin des temps, ce jour correspond à la vie éternelle dont parle souvent Jésus. Ainsi la vie éternelle est comparée à un immense festin préparé par Dieu et où tous sont invités. Cette image exprime à la fois l’initiative de Dieu, l'universalité du salut et la félicité vécue dans la vie éternelle.

Dans sa parabole, Jésus reprend le même thème : un roi célèbre les noces de son fils et invite largement à cette fête. Nous découvrons même que ce roi est davantage préoccupé par ses invités que par les noces de son fils. Son désir est que la salle soit pleine de convives et on l’imagine sans peine traverser la salle et prendre le temps de saluer chacun en lui disant : « Mon ami... » Nous percevons ainsi que Dieu est à la joie de nous appeler à la vie éternelle, à cette amitié vécue avec lui éternellement sans que le péché la rompt.

Dans cette parabole, Jésus prend le soin de détailler les réponses possibles des invités. C'est ainsi qu'il nous alerte sur notre réponse personnelle à l'invitation de Dieu. Il y a tout d'abord ceux qui ne veulent pas répondre à cette invitation, prétextant des raisons sans commune mesure avec l'offre faite par le roi : préférer son champ, son commerce, à un repas où sont préparées des viandes que l'on mangeait rarement.

Cette attitude rejoint la nôtre lorsque, bien qu'ayant le désir de Dieu, nous ne nous donnons pas vraiment les moyens de le mettre en premier dans notre vie. Une nouvelle fois, Jésus nous invite à vérifier si notre relation à Dieu éclaire nos projets et nos engagements ou si, à l'inverse, cette relation est une parmi d'autres, décidant par nous-mêmes de notre vie. La dignité dont parle le roi : « Ils n'en étaient pas digne », n'exprime pas le fait de ne pas être à la hauteur de l'invitation mais le choix de lui préférer des occupations moindres.

Nous découvrons en effet, avec la suite du texte, que pour être invités Dieu n'exige pas de nous que nous soyons bons. Pour Dieu, les mauvais ne sont pas exclus : « Ils rassemblèrent tous ceux qu'ils rencontraient, les mauvais comme les bons ». Le sentiment, qui correspond souvent à une réalité, de ne pas être à la hauteur de l’amour de Dieu, ne doit pas nous arrêter dans notre recherche de Dieu. Ce serait pour nous une impasse de vouloir nous convertir par nous-mêmes avant de mettre Dieu en premier dans notre vie. Bien au contraire, c'est à travers notre vie chaotique – mais en choisissant résolument Dieu – que peu à peu Dieu nous rendra capables de nous convertir.

Reste alors, pour revenir à la parabole, cet homme qui n'a pas revêtu l'habit de fête et qui est jeté dehors, dans les ténèbres. S'agit-il d'une punition ? Non ! Quel est le drame de cet homme ? Il était d'usage, à l'époque de Jésus, que celui qui vous invite vous fournisse un vêtement propre à votre arrivée. En effet, les conditions de déplacement n'étaient pas propice à partir de chez soi avec un habit de fête !

Le roi interroge donc cet invité qui n'est pas passé par le vestiaire, tout en l’assurant de son amitié : « Mon ami, comment es-tu entré ici, sans avoir le vêtement de noce ? » Ce qui condamne cet homme, ce n'est pas d'être sans vêtement de fête, c'est son mutisme : il garde le silence exprimant ainsi qu'il ne veut pas de cette relation avec le roi. Le roi prend au sérieux son attitude et le fait placer là où il n'est pas puisque cet invité ne veut pas de lui. En dehors de Dieu, qui est Lumière et Vie, c'est les ténèbres et la mort. C'est l'attitude de cet invité qui le fait jeter dehors.

C'est ce que traduit la dernière phrase de l'Évangile : « La multitude des hommes est appelée, mais les élus sont peu nombreux ». Tous les hommes sont appelés (cf. 1ère lecture « tous les peuples »), mais chacun doit décider de sa réponse. L'élection exprime la réciprocité de la relation où Dieu s’engage fidèlement mais que l'homme peut refuser. Cet invité sans habit de fête nous permet de réfléchir à notre manière de participer à l'eucharistie. Le repas eucharistique est la préfiguration de la vie éternelle, comparée à un repas.

A chaque eucharistie, le célébrant affirme : « Heureux les invités au repas du Seigneur… ». Il appartient à chacun de vérifier s’il participe à l’eucharistie en ayant conscience d’être un invité, en décidant de revêtir son cœur de l’habit de noce, tout à la joie d’être accueilli par Dieu. Il suffit, par exemple, d’aller à la messe en redisant au Seigneur notre joie d’aller à sa rencontre, de répondre à son invitation. Cela paraît tout simple, mais changera certainement notre manière de vivre l’eucharistie.

Comme l’eucharistie est une anticipation du jour dont parle Isaïe (cf. 1ère lecture), nous pouvons déjà nous réjouir : « C'est lui le Seigneur, en lui nous espérions ; exultons, réjouissons-nous : il nous a sauvés ! » Assurément, nous serons alors tout heureux d’être les invités au repas du Seigneur !

Père Bruno