Vingt-sixième dimanche du temps ordinaire - année C
29 septembre 2013
Les
textes du jour
Parmi
toutes les réactions que nous pouvons avoir spontanément en écoutant cette
parabole, il y a les deux extrêmes : soit nous nous disons :
« ah, ce mauvais riche, quel égoïste, il n’a que ce qu’il mérite, c’est
bien fait pour lui. », soit au contraire nous prenons le riche en pitié et
nous nous élevons contre cette condamnation sans appel de la part de Dieu en
lui reprochant son manque de miséricorde. Cette dernière réaction est courante
dès qu’on évoque la possibilité d’un jugement dernier et d’un enfer éternel.
Or il
se trouve que dans les lectures que nous entendons depuis quelques dimanches,
Jésus ne cesse de nous révéler la miséricorde du Père (rappelez-vous la
parabole du fils prodigue) et de purifier notre esprit de toutes nos idoles,
c-à-d de toutes les fausses idées que nous nous faisons de Dieu. Dieu n’est pas
ce que nous projetons sur lui, mais dans ce qu’il nous révèle. Ce que nous
projetons sur lui se manifeste à travers nos réactions immédiates (un Dieu qui
condamne c’est inadmissible !) ; ce que Dieu nous révèle se manifeste
dans un deuxième temps, lorsque nous pouvons faire silence et accueillir la
nouveauté, accueillir ce qui vient de lui et pas de nous.
Alors
qu’est-ce que Dieu révèle de lui-même dans cette parabole et en quoi cela
éclaire notre vie d’aujourd’hui ? Un Dieu qui prend soin de nous, qui nous
a non seulement créés avec des yeux pour voir et un cœur pour aimer, mais qui
veut en plus nous donner les bonnes lunettes. C’est ainsi que l’on pourrait
intituler cette parabole : « avoir les bonnes lunettes », des
lunettes qui permettent de voir l’essentiel, de ne pas passer dans notre vie à
côté de l’essentiel sans le voir. Cette parabole du riche et du pauvre Lazare
n’a pas d’autre but. On y voit un riche – qui n’a pas de nom parce qu’il
représente chacun de nous – qui n’avait pas les bonnes lunettes et qui n’a pas
vu Lazare. Ce qui est reproché au riche, ce n’est pas sa richesse, mais sa
manière de vivre en ignorant les autres, en particulier le pauvre qui se tenait
à sa porte. Il ne semble même pas avoir remarqué la présence de ce pauvre à sa
porte. Ce riche a creusé lui-même un abîme entre lui et Lazare tout au long de sa vie.
Dieu l’avait
pourtant bien mis en garde à travers Moïse et les prophètes, c-à-d à travers
toute l’Écriture. Dans la première lecture nous avons entendu un exemple de
forte mise en garde par le prophète Amos. Nous, en plus de Moïse et des
prophètes, nous avons Jésus, le seul qui est revenu d’entre les morts !
Comprenons
ce que Jésus veut nous enseigner dans cette parabole : il existe une loi
spirituelle qui fait que si je me rapproche des autres, je me rapproche de Dieu
et si à l’inverse, je m’éloigne des autres, je m’éloigne de Dieu. C’est ce qui
est arrivé à ce riche : il s’est tellement centré sur lui-même qu’il a
fini par se couper de Dieu de façon irréversible. Saint Jean n’a-t-il pas
écrit : « Si quelqu'un prétend aimer Dieu tout en détestant son
frère, c'est un menteur. Car s'il n'aime pas son frère qu'il voit, il ne peut
pas aimer Dieu qu'il ne voit pas » ? (1Jn 4,20)
Pour
l’évangile mon prochain est celui dont je me fais proche (Cf. la parabole du
bon samaritain)
Même si
l’histoire du riche et du pauvre Lazare est situé dans un au-delà, après la
mort des protagonistes, il concerne surtout notre vie sur terre et les fossés
que les hommes creusent entre eux par leur indifférence, fossés tellement
profonds qu’ils en deviennent infranchissables et qui finissent par les couper
définitivement de Dieu.
Quant
au Ciel, il sera peut-être comme le suggère Karl Barth : Un jour une dame
âgée, inquiète de savoir ce qui allait lui arriver après sa mort, demande au
grand théologien suisse Karl Barth : « au ciel est-ce que je vais retrouver
ceux que j’ai aimé ? » Le théologien la rassure : « Oui
bien-sûr, Madame, vous retrouvez au Ciel tous ceux que vous avez aimé, ainsi
que tous les autres ! »
P.
Michel Lovey