Vingt-quatrième dimanche du temps ordinaire - année C
15 septembre 2013
Les
textes du jour
Ce
dimanche, l’église nous offre un long passage de l’évangile qui comprend trois
paraboles et une brève introduction du narrateur. Les paraboles sont bien
connues, surtout celle du fils prodigue, mais pour bien comprendre cette
dernière parabole je vous invite d’une part à relire la petite introduction du
narrateur qui nous informe sur le contexte dans lequel Jésus raconte ces
paraboles et d’autre part à voir ce qu’il y a de commun aux trois paraboles.
Enfin nous pourrons, dans un troisième temps, regarder en quoi les autres
lectures de ce dimanche éclairent ces paraboles.
1. Dans
l’introduction nous apprenons à qui Jésus adresse ces paraboles, à savoir, les
Pharisiens et les scribes qui récriminaient contre lui : « Cet homme fait bon
accueil aux pécheurs, et il mange avec eux ! » Autrement dit, ces paraboles ne
s’adressent pas d’abord à la foule des pécheurs et publicains qui venaient l’écouter,
mais à quelques autres qui ne venaient pas pour l’écouter ! Jésus veut
leur faire comprendre le sens de sa mission qui est de chercher et ramener les
pécheurs à Dieu. En le faisant, Jésus révèle l’amour du Père pour tous les
hommes, les justes (c-à-d ceux qui croient l’être) comme les pécheurs. Il
s’agit donc d’un enseignement sur la miséricorde divine (qui se trouve au cœur
de l’évangile de Luc).
2. Il
est heureux que nous lisions les trois paraboles et pas seulement celle du fils
prodigue, ainsi nous ne passons pas à côté d’un aspect central qui est
l’attitude du père. En effet, si nous ne lisions que la parabole du fils
prodigue notre attention se tournerait naturellement vers le fils cadet ou vers
le fils aîné et donc vers le thème de la conversion, disons, vu du côté de
celui qui doit se convertir, c-à-d de notre point de vue. Le fils cadet, après
s’être éloigné de son père, fait un chemin de conversion en revenant vers lui.
Le fils aîné est aussi invité à faire un chemin de conversion, mais l’histoire
ne dit rien sur son issue. Or Jésus veut plutôt nous faire voir le point de vue
de Dieu. Cela nous le comprenons en écoutant les deux premières paraboles où
l’attention ne porte pas sur la brebis égarée ni sur la pièce d’argent perdue,
mais bien plutôt sur le berger et sur la femme qui recherchent leur bien. Ce
qu’il y a de commun dans les trois paraboles, c’est d’abord l’attitude de
recherche et ensuite la joie des retrouvailles. Les trois images choisies – le
berger et la brebis, la femme et la pièce d’argent, le père et ses deux fils - parlent
de la même réalité : Dieu qui veut retrouver et se réconcilier tous ses
enfants et la joie qu’il éprouve à chaque fois qu’il en retrouve un. Chaque
brebis est unique aux yeux du berger ; ce n’est pas un troupeau
uniforme ; le berger ne veut en perdre aucune. Il ne faut pas mal
comprendre l’image du troupeau. L’Église n’est pas le troupeau de Dieu, mais
l’ensemble de ceux avec qui Dieu développe une relation personnelle. De même, nous
avons de la valeur aux yeux de Dieu, comme la pièce d’argent aux yeux de la
femme.
Dans la
parabole du fils prodigue, la recherche du père n’est pas moins intense, mais
d’une manière qui respecte la liberté du fils. Le père ne le suit pas pour le
ramener par la peau du cou, mais l’attend à la maison. Son attente est active,
car on peut imaginer qu’il ne se trouvait pas par hasard sur le seuil de sa
maison le jour où son fils est revenu, mais qu’il se rendait chaque jour au
bout du chemin de son domaine pour scruter l’horizon dans l’espoir de voir
revenir son fils tant aimé. La manière dont il se précipite au-devant de lui
témoigne de la force, de l’ardeur de son attente et donc du désir de Dieu pour
chacun de nous.
3. Dans
la deuxième lecture Paul témoigne de son propre chemin de conversion et de son
expérience concrète de la miséricorde de Dieu : « moi qui autrefois
ne savais que blasphémer, persécuter, insulter. Mais le Christ m'a pardonné :
ce que je faisais, c'était par ignorance, car je n'avais pas la foi ; 14 mais la grâce de notre Seigneur a été
encore plus forte, avec la foi et l'amour dans le Christ Jésus. »
La
première lecture tirée du livre de l’exode montre
un visage de Dieu bien
différent, plus proche de l’image de Dieu que se font les
scribes et les
pharisiens, une image de Dieu entachée par une vision humaine de
la justice qui
réclame punition. L’image déformée
d’un Dieu dont on pourrait acheter l’amour
par de bonnes actions, image terrifiante d’un Dieu qui se met en
colère, punit
et condamne à mort. La révélation du Dieu de
miséricorde, n’a pas attendu la
venue de Jésus, mais elle a été très
progressive au fils des siècles jusqu’à ce
qu’avec Jésus, le vrai visage du Père soit
manifesté. C’est la patience de Dieu
devant nos duretés de cœur, comme la patience du
père dans la parabole du fils
prodigue. Ajoutons que ce n’est pas parce que Jésus a
révélé l’amour
miséricordieux du Père que nous sommes
débarrassés des images déformées de
Dieu. Chacun devra, dans son propre chemin de conversion, passer de
l’image de
Dieu qui punit à celle du Dieu qui n’est qu’amour,
révélée dans l’évangile de
Luc. Chacun devra purifier sa propre connaissance de Dieu de tous qui a
été
projeté sur lui de trop humain. La tentation demeure forte de se
faire un Dieu
à notre image.
P.
Michel Lovey