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Dixneuvième dimanche du temps ordinaire                 8 août  2010

Révélation étonnante que celle de Jésus au début de cet Evangile : Notre Père a trouvé bon de nous donner le Royaume de Dieu ! Et grâce à cela nous pouvons être sans crainte. Lorsque Jésus parle du Royaume de Dieu, il l’évoque surtout à travers des paraboles. Nous pouvons dire que ce Royaume est la vie nouvelle que Dieu veut pour nous, où tout homme sera un avec les autres et avec le Christ.

Nous vivrons pleinement cette réalité du Royaume de Dieu dans la vie éternelle et souvent Jésus nous appelle à nous convertir en vue de cette réalité. L’Evangile de ce dimanche apporte un éclairage déterminant puisque désormais nous savons que ce Royaume nous est déjà donné. La conversion n'est donc pas en vue d'obtenir le Royaume de Dieu mais parce que nous l'avons déjà obtenue. Qu'est-ce à dire ? C'est la suite de l'Evangile qui nous permet de le comprendre.

Nous devons être « comme des gens qui attendent le retour de leur maître ». Et pour cela nous devons veiller en restant en tenue de service. À chaque eucharistie nous affirmons notre désir du retour du Christ. C'est le sens de l'anamnèse, l'acclamation qui suit les paroles de la consécration : « nous attendons ta venue dans la gloire ». Veiller c’est donc vivre l’aujourd'hui en espérant ardemment le retour du Christ. Vivons-nous vraiment dans cette perspective ?

Notre foi est fidélité à cette promesse, à cet à-venir qui oriente toute notre vie, et fait de nous d’infatigables pèlerins du Royaume. Nous sommes « des étrangers et des voyageurs sur cette terre » (2ème lecture) qui, jour après jour, poursuivons notre route avec cet ardent désir d’accueillir, dans la foi, le Christ ressuscité. Car « la foi est le moyen de posséder déjà ce qu’on espère et de connaitre des réalités qu’on ne voit pas » (2ème lecture). La vie chrétienne authentique est une vie toute tendue vers le Seigneur qui vient, vécue dans une attente ardente de son retour : « Maranatha ! Viens Seigneur Jésus ! » (Ap 22, 20).

Croire au retour du Christ c'est donc affirmer que Dieu ne se désintéresse pas de nous. Au contraire, il désire que nous choisissions de vivre avec lui. C'est en ce sens que le Royaume de Dieu nous est donné mais encore faut-il que décidions de l'accueillir. Notre mission est donc à la fois de vivre dans la perspective de cette vie éternelle à laquelle nous aspirons, et à la fois de permettre à tout homme de choisir cette vie que Dieu nous promet.

Le passage de l'Epître aux Hébreux illustre cet appel à s’ouvrir à la vie éternelle en prenant l'exemple d'Abraham. Celui-ci ne s'est pas mis en route parce qu'il était certain de ne pas se tromper mais « grâce à la foi, il obéit à l'appel de Dieu ». La foi d'Abraham est dans cette assurance que Dieu ne peut pas le décevoir, que Dieu réalisera sa promesse avec lui. Vivre le quotidien avec cette foi, c’est croire que la vie de Dieu nous est déjà donnée même si nous en vivons partiellement à cause de notre péché.

Cette attente n’est pas pour autant passive. Notre mission nous engage à permettre à tout homme de choisir la vie de Dieu. C'est le sens de la réponse que Jésus fait à Pierre : «  Le maître a confié à ses intendants la charge de ses domestiques ». Nous sommes responsables de nos frères, de leur vie. C'est pourquoi nous sommes appelés à rester en tenue de service, à être leurs serviteurs. Parce que le Royaume de Dieu nous est donné nous ne pouvons pas vivre sans nous intéresser au devenir de nos frères.

Nous sommes certains, dans la foi, du salut offert à tout homme : « Assurés des promesses auxquelles ils avaient cru, ils (nos pères) étaient dans la joie » (1ère lecture). C’est pourquoi nous avons le devoir de nous sentir solidaires du salut de nos frères et de tout mettre en œuvre pour le leur témoigner par notre foi vivante et agissante par la charité (cf. Ga 5, 6). A la suite du Christ, le disciple est appelé à devenir serviteur de la charité, en se mettant au service de chacun dans la gratuité d’un amour désintéressé, ne cherchant rien d’autre que de hâter l’avènement du Royaume.

Telle est la volonté du Père. C'est à l'amour que nous aurons pour tout homme que nous serons jugés. Parce que nous connaissons cette volonté de Dieu il nous sera beaucoup demandé. « Où est ton frère ? » nous demandera Dieu, comme il l’a demandé à Caïn qui venait de tuer Abel. L’exigence de l'Evangile n'est donc pas pour obtenir quelque chose de Dieu mais pour permettre au plus grand nombre d'accueillir la vie de Dieu en étant nous-mêmes serviteurs de nos frères, à la suite du Christ qui s’est fait serviteur.

Le trésor inépuisable dont parle Jésus consiste donc à la richesse d’aimer nos frères, de faire de cette exigence notre priorité en nous désencombrant de ce qui risque de nous détourner du Royaume : « Vendez ce que vous avez et donnez-le en aumône », car là où est notre trésor là aussi sera notre cœur.

Père Bruno