Quinzième dimanche du temps ordinaire 15 juillet 2012
Les textes du jourSaint Paul, dans la deuxième lecture, nous
livre le grand projet de Dieu concernant l'humanité. Il évoque d'abord le don
de Dieu pour tout homme : « Ils nous a
comblés de sa bénédiction spirituelle en Jésus-Christ » et « il nous a choisis avant la création du monde
» (2ème lecture). Depuis toute éternité, chacun d'entre nous est dans le cœur
de Dieu, comblé de son amour. Paul présente ensuite notre destinée : « Etre saints et irréprochables sous son
regard ». Dieu nous espère à partir de la finalité qu’il donne à notre
existence : « Il nous a d'avance destinés
à devenir pour lui des fils par Jésus-Christ » ; En Jésus-Christ, « il nous a d'avance destinés à devenir son
peuple ». Et pour réaliser cela l'Esprit est la première avance que le Père
nous a faite.
Le projet de Dieu est donc simple : nous
sommes choisis par lui et destinés à devenir des fils et son peuple – donc des
frères – par le Christ. Il nous comble déjà de sa grâce inépuisable et nous
donne la marque de l'Esprit Saint. Si du côté de Dieu sa volonté est claire, il
dépend de l'homme de choisir d'entrer dans ce projet, d'accepter de devenir
fils et frère dans le Christ. Depuis Abraham, Dieu envoie des hommes ordinaires
pour témoigner de ce grand projet auprès de tous.
L'Évangile d'aujourd'hui nous donne les
conditions pour vivre cette mission. Les Douze sont envoyés deux par deux : nul
n'est disciple tout seul. Ce binôme signifie que cette mission doit être vécue
en Église. On ne peut pas témoigner de la Bonne Nouvelle du salut réalisé en
Jésus-Christ sans être soi-même envoyé par l'Église, signe et sacrement de ce
salut. Les Douze reçoivent le pouvoir sur les esprits mauvais, ils chassent
beaucoup de démons et guérissent de nombreux malades. Nous retrouvons là la
même mission que celle de Jésus. Nous sommes envoyés par le Christ en
partageant la même mission que lui.
Unis à lui, nous sommes appelés à être pour
les hommes de ce temps le visage même du Christ. Cela suppose de notre part un
profond enracinement au Christ, sans chercher à vouloir compter sur nos seules
forces ou sur une stratégie missionnaire. C'est le sens de la consigne de Jésus
: « Ne rien emporter pour la route, si ce
n'est un bâton ; n'avoir ni pain, ni sac, ni pièces de monnaie ». De façon
étonnante, Jésus n'indique pas à ses disciples ce qu'ils auront à dire. On
aurait pu imaginer qu'il leur propose un discours à dire, une méthode
d'évangélisation… Non ! Il insiste simplement sur la capacité d'accueil de ceux
vers qui vont les disciples.
Le disciple n'est pas tenu à un résultat,
mais il doit se rendre présent à l'autre, le laissant libre de l'accueillir. Il
ne s'agit ni de convaincre, ni de forcer mais d'être là, tout accueil. Quand
souvent nous pouvons avoir la tentation de convaincre, d'expliquer, le Christ
nous recentre sur l'essentiel. Jésus s'est comporté exactement de cette façon
lorsque le jeune homme vient le trouver pour savoir comment recevoir la vie
éternelle. Quand il renonce à mettre en œuvre ce que Jésus lui dit, celui-ci
n'insiste pas, ne se lance pas dans une explication : il le regarde s'en aller.
Nous sommes donc appelés à vérifier notre
capacité à vivre l'hospitalité les uns envers les autres. Hospitalité et
hostilité ont la même étymologie, venant du même mot latin hostis – étranger. L'étranger, celui qui est différent, peut
devenir l'hôte comme l'ennemi. L'hospitalité est en quelque sorte la démarche
qui humanise nos relations. Elle implique une dimension de réciprocité dans la
gratuité, l'accueil bienveillant de l'autre en se laissant soi-même déplacer
par celui qu’on reçoit.
« N'oubliez
pas l'hospitalité : elle a permis à certains, sans le savoir, de recevoir chez
eux des anges » (Hébreux 13,2). Pratiquer l'hospitalité, accueillir l'autre
en le laissant entrer chez soi, témoigne de la manière dont nous laissons Dieu
entrer chez soi. Dieu s'invite souvent sous les apparences du plus petit, du
plus fragile qui frappent à notre porte. Nous en faisons l’expérience en
pratiquant l’hospitalité les uns envers les autres.
Ainsi donc, être témoin de ce grand projet
d'amour de Dieu dont nous parle Saint Paul est à la portée de tout le monde. Ce
n'est pas la compétence qui fait de nous des témoins, mais le réel désir de
nous ouvrir les uns aux autres et de nous ouvrir à Dieu. C'est déjà ce que le
prophète Amos exprime : « Je n’étais pas
prophète ni fils de prophète ; j'étais bouvier… Le Seigneur m'a saisi quand
j'étais derrière le troupeau, et c'est lui qui m'a dit : ‘Va, tu seras prophète
pour mon peuple’ ».
Laissons-nous saisir par la grâce de Dieu,
accueillons au plus intime de nous-mêmes son appel à être prophète pour son
peuple d'aujourd'hui. Le Seigneur compte sur chacun d'entre nous, nous qui
sommes « ceux qui d'avance avaient espéré
dans le Christ, à la louange de sa gloire » (2ème lecture).
Père Bruno