Fête de la Toussaint
Année A 1er novembre 2011
Les textes du jour
« Voyez comme il est grand l'amour dont le Père nous a comblés. » Pourrait-on imaginer plus belle déclaration d'amour de la part de Dieu ! Il nous comble gratuitement, inconditionnellement de son amour. C'est son amour qui nous donne d'être ce que nous sommes, c'est-à-dire ses enfants. Voilà que Dieu veut vivre avec chacun de nous une relation filiale. Savons-nous prendre suffisamment du temps pour considérer cet amour de Dieu dans notre vie ?
Une chose est de savoir que Dieu nous aime ; autre chose est de faire de cet amour le moteur de notre vie. Trop souvent nous risquons d'avoir une vision étriquée de notre vie, la réduisant à ce que nous réussissons, ce que nous maîtrisons ou voulons maîtriser. Placer au cœur de notre vie cet amour de Dieu dont nous sommes comblés, c’est prendre en compte tout ce que nous sommes pour Dieu, c'est être assurés que rien ne peut empêcher Dieu de nous aimer, pas même nos limites et notre péché.
Il ne suffit pas à Dieu de nous aimer ; il veut que nous soyons semblables à son Fils. Nous avons donc cette certitude que lorsque nous verrons le Fils de Dieu, nous ressemblerons à celui que nous cherchons tout au long de notre vie sur terre. La vie éternelle est cette vision du Fils de telle sorte que nous accueillerons totalement l’amour du Père, tandis qu'aujourd'hui nous nous détournons de cet amour par notre péché. Saint Jean a raison de parler d'espérance. Car cette espérance de vivre éternellement de l’amour du Père ne peut que soutenir notre vie. Saint-Paul affirme : « Rien ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu qui est en Jésus Christ notre Seigneur » (Romains 8, 39).
Si nous sommes enfants de Dieu, nous avons à choisir de devenir fils. Être fils c’est faire de notre vie une réponse à cet amour de Dieu. Comment ? En empruntant le chemin des Béatitudes. Comme nous le savons, ces Béatitudes sont comme un autoportrait de Jésus. Avant de vouloir les mettre en œuvre, il est important de contempler la manière dont Jésus a vécu chacune d'entre elles.
Cela suppose de notre part que nous approchions de lui comme ses disciples sur la montagne. Si Jésus ouvre la bouche, nous devons ouvrir nos oreilles, ou plus exactement notre cœur car c'est au plus intime de même que ces Béatitudes sont appelées à retentir. Et Jésus instruit ses disciples pour qu'à leur tour ils enseignent la foule qui le suit.
En cette fête de la Toussaint, laissons-nous instruire par ces Béatitudes, accueillons-les de façon nouvelle. Notons que Jésus est affirmatif. Il ne dit pas : « vous serez bienheureux si vous êtes pauvres, doux… ». Ces Béatitudes s'adressent à tous. Ce qui ouvre au vrai bonheur, c'est une attitude de cœur dont la porte d'entrée est la pauvreté de cœur.
« Heureux… Heureux… » Tout homme aspire au bonheur, à un bonheur vrai qui comble le cœur. Le bonheur ne coïncide pas avec le plaisir, la possession, le pouvoir, tout ce qui referme sur soi. Le bonheur se découvre bien plutôt avec ce qui nous ouvre à l'autre, à tous les autres. Nul ne peut donc se donner ce bonheur, on le reçoit des autres, il vient d'ailleurs. Aussi n'est-ce pas un hasard si c'est par la pauvreté de ceux qui ont tout à recevoir que nous entrons dans ces béatitudes : « Heureux les pauvres de cœur ». Là est le secret du vrai bonheur, d'un bonheur qui est accueil de Dieu et de l’autre.
Pour cette première béatitude, comme pour celle des persécutés pour la justice, le verbe est au présent : « Le royaume des cieux est à eux ». Le futur des autres béatitudes n'indique pas une utopie réservée pour plus tard ; il trace l'avenir qui s'ouvre pour celui qui s'engage sur ce chemin. Les saints que nous célébrons aujourd'hui illustrent, chacun à leur manière, la réalisation de ces Béatitudes.
Fêter les saints, c'est fêter l'action de Dieu en eux : « Tu es glorifié dans l'assemblée des saints ; lorsque tu couronnes leurs mérites, tu couronnes tes propres dons » (préface des saints). A travers cette multitude de saints, Dieu voit son dessein de salut prendre toute son ampleur. Son plan n'a pas échoué, tout ce qu'il a accompli par amour des hommes n'a pas été vain : la Toussaint est l'affirmation de sa réussite. Dieu communique sa sainteté à tous les hommes. Les saints sont ceux qui l’ont accueillie et vécue sans réserve.
Voilà pourquoi l'Eglise nous propose de nous appuyer sur l’exemple des saints. Non seulement ils attestent par toute leur vie que les Béatitudes ne sont pas un vague programme, mais, étant déjà auprès de Dieu, ils nous entraînent sur ce chemin. Car c'est vrai, reconnaissons que les Béatitudes nous prennent un peu à rebrousse-poil. Elles laissent entendre que notre force se déploie dans une certaine vulnérabilité.
La
sainteté n’a rien à voir avec la perfection. Elle s'enracine toujours dans une
ouverture du cœur qui place le Christ au centre de notre vie. Etre saint, ce
n’est pas faire de grande chose, mais essayer de faire toutes choses par amour.
C’est mettre en Christ toute notre confiance, toute notre espérance.
Père Bruno