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Fête de Saint Jean Baptiste             24 juin  2012

Les textes du jour (cliquez ici)

« Que sera donc cet enfant ? » Telle est la question de tous ceux qui apprennent le nom de Jean-Baptiste. En ce dimanche où nous célébrons la fête de la nativité de Jean-Baptiste, nous pouvons contempler le projet de Dieu plus que la mission qui sera celle de Jean et dont le temps de l’Avent se fait largement écho.

Dans la tradition biblique, le nom caractérise déjà la mission. Cet enfant qui vient de naître aurait dû s’appeler Zacharie, comme son père. Zacharie signifie que "Dieu s’est souvenu" et voilà que ses parents choisissent de le nommer Jean, qui signifie "Dieu fait grâce". À la naissance de Jean-Baptiste, ses parents reconnaissent la grâce à l’œuvre en lui et à travers lui. C’est ainsi que cette naissance nous concerne car tout comme pour Jean-Baptiste, la grâce, c’est-à-dire le don de Dieu, est à l’œuvre en chacun.

À partir du moment où Zacharie reconnaît cette grâce, il retrouve l’usage de la parole. Lorsque l’ange lui annonce que sa femme est enceinte, Zacharie veut savoir, être sûr : « Comment vais-je savoir que cela arrivera ? » (Luc 1,18). Cette maîtrise conduite à étouffer la grâce, à vouloir restreindre son œuvre à ce que nous en savons. C’est donc se couper de Dieu, ce que traduit le mutisme de Zacharie après que l’ange l’ait quitté. Dès qu’un croyant doute de la Promesse de Dieu, il n’a plus de parole à faire entendre. Mais dès que Zacharie donne son accord au plan de Dieu, dès qu’il accepte de vivre cette naissance comme un don de Dieu, alors il peut reprendre la parole et bénir Dieu.

Le croyant est également appelé à se laisser étonner par la grâce qui agit en l’autre. C’est ce qu’exprime la question de l’entourage des parents de Jean-Baptiste. « Que sera donc cet enfant ? » Le verbe est au futur. Plus que la réponse à cette question, c’est l’attitude qu’elle sous-tend qui est importante. Elle ouvre un avenir pour celui qui n’a pas encore construit sa vie. Elle invite à s’émerveiller sur ce qui n’est pas encore. C’est ainsi que Dieu regarde chacun de nous ; il voit non pas les apparences mais le cœur.  Dieu a toujours foi en nous.

« Que sera donc cet enfant ? » et non « que fera cet enfant ? ». Nous considérons souvent les personnes à partir de ce qu’elles font. Une telle perception des autres ne les rend pas uniques et surtout nous conduit à les classer selon leurs compétences. Et le classement conduit bien souvent au jugement… L’unicité de chacun réside dans sa manière d’aimer. Dieu attache de l’importance à ce que nous sommes plus qu’à ce que nous faisons : c’est ainsi que nous sommes uniques à ses yeux. Dieu espère toujours en nous.

« Que sera donc cet enfant ? » A chacun Dieu donne lors de sa naissance un nom, mais aussi une mission, une dynamique de vie. Dieu nous enfante, tout est grâce et tout devient grâce quand tout vécu comme un don de Dieu. Laisser la grâce agir en soi c’est alors résister au découragement qui guette celui qui veut garder la mainmise sur des résultats à obtenir.

C’est le constat amère de celui qui s’exprime dans la première lecture : « Je me suis fatigué pour rien, c’est pour le néant, c’est en pure perte que j’ai usé mes forces. » Il découvre alors que sa force n’est pas dans ce qu’il réussit mais dans le Seigneur lui-même. Il tient cette force de la certitude qu’il est précieux aux yeux de Dieu : « Oui, j’ai du prix aux yeux du Seigneur, c’est mon Dieu qui est ma force. »

C’est pourquoi Dieu ne nous considère pas comme des serviteurs – celui qui fait – mais comme des amis – celui qui est aimé et aime (cf. « Je ne vous appelle plus serviteurs… ; maintenant, je vous appelle mes amis » Jean 15,15) – appelés par lui à être lumière pour les autres. Laisser agir la grâce en soi c’est permettre à l’amour de Dieu rayonner à travers soi, à travers ses actes, ses engagements, ses paroles.

Célébrer la naissance de Jean-Baptiste nous fait prendre conscience de la grâce que Dieu fait à chacun, nous assure de cet avenir que Dieu s’engage à construire avec chacun – avenir qui n’est pas à calculer mais a accueillir –, nous invite à laisser Dieu faire de nous une lumière pour les autres. Autant d’éléments source pour nous de joie spirituelle, comme nous le demandons dans l’oraison de ce jour : « Accorde à ton Église le don de la joie spirituelle » (oraison de la messe de la nativité de Jean Baptiste).

C’est ainsi que nous pouvons avoir sur nous-même ce cri d’admiration du psalmiste : « Je reconnais devant toi le prodige, l’être étonnant que je suis » (psaume du jour).

Père Bruno