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Assomption de la Vierge Marie                 15 août  2011

En cette fête de l’Assomption de Marie il y a un contraste entre l’Evangile et les deux premières lectures de la messe d’aujourd’hui. Dans le livre de l’Apocalypse comme dans la lettre de Paul, il est question de combat et de victoire : victoire de la femme sur le dragon, victoire du Christ sur la mort. Mais ne nous y trompons pas ! L’Assomption de Marie n’est pas sa victoire au terme d’une vie exemplaire, pas plus qu’elle n’est une récompense pour avoir enfanté le Fils de Dieu !

Certes, « Marie a triomphé de la mort » – comme le proclame Pie XII en déclarant le dogme de l’Assomption de Marie le 1er novembre 1950 – mais par une grâce venant de la mort et de la résurrection de son Fils. C’est Dieu lui-même qui a fait monté Marie jusqu’à la gloire du ciel, avec son âme et son corps (cf. oraison de la messe de l’Assomption), qui a préservé du tombeau le corps qui avait porté le Fils de Dieu et mis au monde l’auteur de la vie (cf. préface de l’Assomption).

Marie n’est pas une déesse ! Elle n’est sainte que comblée de la grâce de Dieu, elle n’est mère que par la bienveillance du Père en vue du salut de tous les hommes. En elle est déjà réalisée la promesse faite « en faveur d’Abraham et de sa race à jamais » (Evangile). Comme chacun d’entre nous, Marie a été confrontée à toutes sortes de situations humaines marquées par la souffrance, les combats et la crainte. Mais elle les vit dans une totale confiance en Dieu, dans une absolue certitude la réalisation de la Parole de Dieu en elle et en tout homme. « Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dire de la part du Seigneur ! » (Evangile)

C’est tout le sens de l’Evangile de ce jour. Pour célébrer l’Assomption de Marie, l’Eglise nous donne d’entendre le récit de la Visitation, scène familière de la rencontre de deux cousines, enceintes toutes les deux.  Quoi de plus humain que cette scène ? Dès que Marie sait qu’elle porte un enfant et que sa vieille cousine Elisabeth est elle aussi enceinte depuis six mois, elle part – en toute vitesse, nous dit saint Luc – courant avec l’aisance et l’ardeur d’une toute jeune fille, à travers les collines du désert de Judée, pour aller partager avec Elisabeth leur joie commune d’être toutes les deux porteuses de vie nouvelle.

Dans un monde où l’on ne pouvait pas prévenir de son arrivée par téléphone, Internet ou SMS, on peut s’imaginer facilement à la fois la surprise et la grande joie d’Elisabeth de voir tout à coup arriver sa jeune cousine.  Toutes deux s’émerveillent du mystère de vie qui est en elles. Et cet émerveillement partagé libère une parole d’action de grâce. Nous sommes invités à entrer dans cette action de grâce, celle d’Élisabeth mais plus encore celle de Marie.

La salutation de Marie engendre la joie, non seulement chez Elisabeth, mais aussi chez l’enfant que celle-ci porte.  « Dès que j’ai entendu ta salutation, dit-elle, l’enfant a tressailli d’allégresse au-dedans de moi ». Lorsque ces deux femmes se rencontrent, ce sont aussi leurs deux enfants, encore en leur sein, qui se rencontrent et eux aussi sont remplis de joie à cette rencontre.

Après trois mois, Marie retourne chez elle, reprenant sans doute ses activités quotidiennes avec Joseph. Elle est habite par une Bonne Nouvelle : « Le Seigneur fit pour moi des merveilles, saint est son nom ! » La reconnaissance de ce mystère n’a pu qu’illuminer son existence comme elle doit aujourd’hui illuminer la nôtre.

La fête de l’Assomption oriente le regard que nous portons sur notre quotidien. Bien sûr, notre vie comptera toujours son lot de difficultés, de questionnements, voire de souffrances, mais avec Marie nous connaissons l’horizon de notre vie : la vie bienheureuse avec Dieu. Celle-ci se réalise par la mort et la résurrection du Christ et demande de notre part une foi en l’accomplissement de la promesse de Dieu de vouloir sauver tous les hommes. Marie soutient notre espérance en chemin (cf. préface de l’assomption). Et tout commence par notre qualité d’accueil les uns envers les autres.

Chaque rencontre est appelée à devenir une visitation où nous sommes tantôt comme Elisabeth exprimant notre bonheur d’accueillir l’autre – « Comment ai-je ce bonheur que tu viennes jusqu’à moi ? » (cf. Evangile) –  tantôt  comme Marie témoignant de la force de l’amour de Dieu en chacun – « Il élève les humbles, il comble de biens les affamés » (cf. Evangile) – C’est ainsi que notre quotidien sera traversé par la même espérance que celle qui donne à Marie de vivre chaque jour dans une totale confiance en Dieu, en laissant sa Parole se réaliser en elle et à travers elle.

Quand nous disons que Marie est entrée dans la gloire avec son corps cela veut dire qu’elle y est entrée avec toute sa vie corporelle, sa vie de femme, une vie sans péché, une vie toute de foi et d’amour. Sa maternité miraculeuse, ses tâches domestiques, sa prière, son amour pour Joseph, sa sollicitude pour Élisabeth comme pour les convives à Cana, sa présence discrète et priante dans l’Église naissante, tout est assumé dans la plénitude de Dieu et constitue aujourd’hui sa gloire et sa joie.

Cette fête éclaire nos actions, les transfigure, nous en révèle le sens profond et leur valeur d’éternité. Marie nous précède et nous ouvre un chemin de lumière, de joie et de grande espérance. Avec elle, toute notre vie est appelée à entrer dans une action de grâce, un Magnificat, pour ce que Dieu réalise, mais surtout pour ce que Dieu est et nous révèle de nous-mêmes.

Père Bruno