Homélie du dimanche 7 février

Dans les lectures de ce dimanche nous entendons deux récits de vocation. Au-delà des grandes différences entre ces deux récits – d’un côté la vision grandiose d’Isaïe et de l’autre l’histoire toute simple de la pêche au bord du lac de Génésareth – chaque fois, c’est Dieu qui prend l’initiative d’appeler car il cherche des messagers de sa bonne nouvelle. Dans les deux épisodes, Dieu révèle sa présence : à travers une vision dans le Temple chez Isaïe, par la présence de Jésus et le signe de la pêche miraculeuse. Dans les deux cas, la présence de Dieu provoque un sentiment d’effroi et d’indignité : Isaïe s’écrie « Malheur à moi ! je suis perdu, car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures : et mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers ! » ; Pierre tomba aux genoux de Jésus, en disant : « Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur. » Dieu n’avait-il pas dit à Moïse : « Tu ne pourras pas voir mon visage, car un être humain ne peut pas me voir et rester en vie » (Ex 33,20). D’ailleurs, dans l’Ancien Testament Dieu ne se montre jamais ouvertement. Quand Dieu appelle le prophète Isaïe, il fait seulement entendre sa voix et agit par l’intermédiaire d’un séraphin, comme si Dieu voulait protéger l’homme de sa vue trop éblouissante. La sainteté de Dieu est tellement grande qu’elle provoque l’effroi et la crainte chez ceux qui perçoivent sa présence. Néanmoins, le Seigneur désire se faire proche de nous.

C’est pourquoi, en Jésus, Dieu vient au milieu de nous de façon « cachée », humble. La simplicité du récit de la pêche miraculeuse nous enseigne davantage qu’un long traité de théologie sur la manière d’agir de Dieu avec nous. A travers les différentes phases de l’histoire – Jésus s’approche, il monte dans la barque, il enseigne puis il ordonne d’avancer au large et de jeter les filets – nous apprenons tout d’abord que c’est Dieu qui vient au devant de l’homme en difficulté. C’est lui qui prend l’initiative de s’approcher et qui s’invite chez nous, comme il monte dans la barque de Simon. Ensuite il  enseigne : si nous l’accueillons, il nous révèle sa sagesse divine. Enfin il nous conduit en avant, vers le large et rend notre vie féconde dans l’activité qui est la nôtre, en l’occurrence, pour Simon et ses compagnons, c’est la pêche. Evidemment, la fécondité qui est signifiée par l’abondance de poisson ne signifie pas que Dieu va rendre notre commerce prospère ou nous enrichir de bines matériels. Il s’agit d’une fécondité spirituelle, au service du règne de Dieu. D’ailleurs Jésus précise aussitôt à Pierre qu’il ne va pas accumuler des richesses matérielles en rendant florissante son entreprise de pêche : « Sois sans crainte, lui dit-il, désormais ce sont des hommes que tu prendras. » Simon mettra désormais son effort au service de Jésus et des hommes pour les conduire à cette rencontre que lui-même vient de faire avec le Sauveur.

Simon-Pierre ne s’y trompe pas. Il est conscient de son péché, même s’il n’a pas encore compris que le salut : « Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur ». Justement, Jésus est venu apporter le salut de l’âme : « Ce ne sont pas les gens en bonne santé qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler des justes mais des pécheurs, pour qu’ils se convertissent. » (Lc 5,31-32) Ce n’est pas notre péché, notre indignité qui arrête Dieu ! Il lui suffit que nous en prenions conscience, que nous soyons en vérité devant lui. Quand nous sommes confrontés à nos limites et que notre vie semble infructueuse, alors Dieu peut venir à notre aide si nous le laissons agir. Le seul effort qui nous est demandé, si on y réfléchit, c’est la confiance et la disponibilité. Tout a commencé parce que Pierre a fait confiance : « Maître, nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ; mais, sur ton ordre, je vais jeter les filets. » Ce reconnaître pécheur est aussi un acte de confiance en Dieu, en sa miséricorde.

P. Michel