Homélie du 18 octobre 2015

(Lectures : Isaïe 53, 10-11 ; Psaume 32 ; Hébreux 4, 14-16 ; Marc 10, 35-45)

« Les dix autres avaient entendu et ils s’indignèrent contre Jacques et Jean. » Voilà bien une attitude humaine où se mêlent tour à tour le jugement et la jalousie. Sans doute les dix ont interprété la demande de Jacques et Jean comme une demande d’occuper les meilleures places. Or que commence par nous dire le texte : « ils s’approchent de Jésus ». Leur désir est d’être proches, de rester proches de Jésus.

La relation qu’ils ont tissée avec lui depuis de longs mois a fait naître en eux le goût d’une intimité profonde avec « celui qui a les paroles de la vie éternelle » (Jn 6, 68). Aussi quand ils ont déjà entendu plusieurs fois Jésus annoncer sa mort de résurrection, leur désir est de participer à cette glorification de Jésus pour rester proche de lui. Jésus le comprend bien puisqu’il commence par leur demander : « Que voulez-vous que je fasse pour vous ? »

Ainsi l’attitude de Jacques de Jean nous renvoie à notre propre attitude envers Jésus, à notre désir de rester proche de lui. C’est toujours au cœur de notre désir, même maladroit, que Jésus nous rejoint. Il attend que nous lui formulions ce que nous voudrions qu’il fasse pour nous afin d’agir en nous. Ne rien demander à Jésus, parfois même sous prétexte qu’il sait mieux que nous-mêmes ce dont nous avons besoin – ce qui est vrai –, c’est ne pas lui exprimer notre volonté de recevoir quelque chose de lui. Demander pour soi au Seigneur c’est ouvrir notre cœur au possible de Dieu en soi dans un acte de confiance, de foi.

Nous ne pouvons que nous émerveiller de l’enthousiasme de Jacques et Jean prêts à aller jusqu’au bout – nous pourrions ajouter, à faire tout ce qu’il faut – pour que se réalise leur demande. Leur réponse spontanée : « nous le pouvons ! » reflète davantage leur emballement plus que la lucidité devant le chemin que Jésus leur propose. Mais qu’importe ! Leur désir est là. Et Jésus alors de leur faire comprendre que siéger à ses côtés n’est pas de l’ordre d’une récompense mais d’un don gratuit à accueillir du Père. Jésus n’accorde pas une place mais prépare notre cœur à accueillir ce que le Père désire pour nous.

Quant aux dix autres, ils restent au niveau des apparences, comme bien souvent nous le faisons envers les autres. Nous les jugeons à partir de ce que nous croyons percevoir d’eux. C’est alors que Jésus va opérer un déplacement pour inviter chacun des Douze, chacun de nous, à une juste attitude. Avec lui, il n’est de pouvoir que dans le service et non la domination ; il n’est de grandeur que dans la petitesse et non dans la force ; il n’est de relation que pour la multitude et non pour soi. C’est bien à ce décentrement de nous-mêmes que Jésus nous appelle, rappelant une nouvelle fois que le sens de sa mission est de donner sa vie et non de commander en maître.

Père Bruno