Homélie du 11 octobre 2015

(Lectures : Sagesse 7, 7-11 ; Ps 89 ; Hébreux 4, 12-13 ; Marc 10, 17-30)

Oui, elle est bien « vivante, la parole de Dieu, énergique et plus coupante qu’une épée à deux tranchants ; elle pénètre au plus profond de l’âme… elle juge des intentions et des pensées du cœur. » (deuxième lecture). Nous en faisons l’expérience en entendant cet évangile et en nous laissant aujourd’hui interpelés comme les disciples se sont laissé interpeler par le dialogue entre Jésus et l’homme riche. La Parole de Dieu dans l’Écriture est toujours vivante, mais tous les textes ne nous parlent pas de la même façon. D’ailleurs les paroles de Jésus sont plus ou moins directes. Souvent il parle de façon indirecte, en parabole, pour qu’on soit libre de ne pas se sentir visé. Mais aujourd’hui Jésus est très explicite.

Les disciples, témoins du dialogue entre Jésus et l’homme riche, sont de plus en plus déconcertés. Lorsque Jésus affirme : « Mes enfants, comme il est difficile d’entrer dans le royaume de Dieu ! Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu », les disciples posent la question: « mais alors, qui peut être sauvé ? » En entendant l’exigence de Jésus à l’égard de l’homme riche – un homme plein de bonne volonté, connaissant l’Écriture et pratiquant les commandements, à qui Jésus demande de vendre tous ses biens pour le suivre – chacun de nous peut se poser la même question : « mais alors, qui peut être sauvé ? » La réponse de Jésus est simple : « Pour les hommes, cela est impossible, mais pas pour Dieu ; car tout est possible à Dieu. » Ouf, ce ne sont pas nos efforts qui nous obtiendrons le salut, c’est Dieu lui-même qui nous le procurera.

Autrement dit, le Royaume de Dieu ou le salut, je le reçois. Alors pourquoi cette demande d’abandonner tous ses biens ? Parce que la seule chose qui dépend de nous, c’est de nous mettre en condition de recevoir. Si je mets ma confiance dans mes biens matériels, je ne la mets pas en Dieu. La question devient alors : en qui est-ce que je mets ma confiance ?

Dieu ne se préoccupe pas de nos richesses, mais de notre cœur. Il sait que les préoccupations matérielles finissent souvent par élever des barrières dans notre cœur (cf. 1e lecture tirée du livre de la Sagesse). Il  ne demande pas à chacun de tout vendre pour le suivre. Il a simplement repéré chez cet homme un attachement à ces richesses qui l’empêche d’accueillir pleinement le royaume. Jésus veut juste le libérer d’une entrave. Puisque l’homme insiste pour savoir le chemin, Jésus finit par lui indiquer son point d’achoppement.

La richesse n’est pas forcément une entrave. Les entraves ne sont pas toujours des biens matériels. Elles sont nombreuses et peuvent aussi être des relations : « personne n’aura quitté, à cause de moi et de l’Evangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants ou une terre, sans qu’il reçoive, en ce temps déjà, le centuple » Tout ce qui nous est le plus cher, ce qui fait notre joie, voilà ce que nous risquons de mettre à la place de Dieu, d’en faire notre trésor. Il s’agit de mettre Dieu à la première place pour que notre rapport aux personnes et aux choses soit bien ajusté. On l’a compris, Jésus ne nous demande pas d’abandonner nos parents. D’ailleurs Jésus rappelle dans la série de commandements qu’il cite : « ne fais de tort à personne, honore ton père et ta mère. » Si nous acceptons le Royaume de Dieu comme un trésor plus grand à recevoir, alors tout le reste nous sera donné par  surcroit, au centuple : « maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres, avec des persécutions et, dans le monde à venir, la vie éternelle. »

La question devient finalement : de quoi vais-je bien pouvoir me désencombrer aujourd’hui pour accueillir  le Royaume de Dieu ?

P. Michel